Interview – Hélène, cofondatrice du Collectif de la fleur française

Interview – Hélène, cofondatrice du Collectif de la fleur française

La fleur fait l’Union… L’Union fait la force

Le Collectif de la Fleur Française, association au service du Slow flower et acteur engagé pour le développement de la filière des fleurs françaises coupées, a été créé le 1er janvier 2017 par Hélène Taquet et Sixtine Dubly.

Maintenant c’est Hélène qui a repris pleinement les rennes, tout en gérant sa ferme florale dans le Nord et son entreprise Popfleurs.

Elle est, tout comme les autres acteurs du Collectif, bénévole et y met tout son cœur et son enthousiasme pour défendre, promouvoir et développer la filière.

Le collectif regroupe et répertorie des producteurs/grossistes/fleuristes, l’idée principale étant de tisser du lien, créer du partage entre chaque maillon de la chaîne, du producteur au consommateur, remettre l’humain au centre, re-localiser cette activité qui était autrefois développée et populaire en France et qui n’a cessé de décroître face à la concurrence de la mondialisation.

Certains membres interviennent depuis quelques temps également auprès des écoles qui forment les futur(e)s fleuristes, ne doutant pas que le message passera en sensibilisant tous les professionnels mais également les consommateurs.

 

Un petit rappel contextuel me paraît nécessaire… :

Aujourd’hui, près de 80% de fleurs coupées proposées chez les fleuristes sont importées. Les fleurs sont produites à l’autre bout du monde (Kenya, Équateur, entre autres…) dans des conditions déplorables pour les sols et les populations sur place. Elles transitent ensuite par la Hollande qui sert de plateforme mondiale de redistribution, pour être ensuite acheminées auprès des grossistes en France, achetées par les fleuristes puis proposées en boutique.

Autant dire que la filière est une catastrophe environnementale et humaine mondiale !

Nous sommes loin du cadre bucolique que l’on s’imagine en allant chez son ou sa fleuriste pour (s’)offrir un bouquet…mais tout n’est pas perdu ! 

L’association œuvre au quotidien et nous sentons que depuis sa création les choses bougent et évoluent.

Nous avons donc questionné Hélène sur certains points qui nous tenaient à cœur :

 

Qu’est-ce qui t’a amené, toi Hélène Taquet, à créer le Collectif de la fleur française il y a 4 ans ? Quelle était ta motivation profonde ?

C’est le constat de l’économie vertueuse de la culture des fleurs qui m’a poussée à concrétiser ce rêve. Mon objectif principal était et est toujours de re-dynamiser nos villages. L’installation d’une ferme florale nécessite de la main d’œuvre pour cultiver. Puis il faut vendre ses fleurs aux fleuristes ou sur les marchés alentours, des rencontres s’ensuivent et génèrent de nombreux échanges.

 

Dans l’équipe du Noyau nous aimons parler de sens… quel sens donnes-tu à l’existence du Collectif de la fleur française ?

Le sens du Collectif c’est la transmission

Éclairer les consommateurs sur les variétés de fleurs et leur saison, leurs permettre de trouver un acteur de la Fleur Française proche de chez eux grâce à l’annuaire du site du Collectif de la fleur française.

Accompagner les jeunes et celles et ceux qui se reconvertissent en les accueillant en stage et en partageant nos expériences

Parler du mouvement Slow Flower, de la philosophie du Collectif de la fleur française dans les écoles de fleuriste et d’horticulture.

 

Quelle serait, selon toi, l’évolution idéale du Collectif de la fleur française? Penses-tu que les critères vont évoluer au fil du temps ? Les 50% de fleurs françaises par exemple…

L’évolution que l’on voit déjà se profiler aujourd’hui, c’est l’augmentation de la surface cultivée en Fleurs coupées. Condition sine qua non pour approvisionner les fleuristes en fleurs françaises. Ensuite il faut redonner une place digne à chaque métier de notre filière : Le producteur doit vivre de ses cultures – le grossiste/logisticien doit regrouper, vendre et distribuer – le fleuriste, créer, magnifier, et promouvoir nos fleurs. Le pourcentage de fleurs françaises augmentera forcément un jour mais nous n’y sommes pas. Un cycle de production est long, Il faut 3 ans pour qu’une ferme florale fournisse une quantité significative de fleurs. Actuellement nous ne pouvons pas fournir plus de 15% de fleur française sur le total des fleurs vendus en France. Alors pour l’instant les fleuristes qui vendent de la fleur française dépensent déjà une telle énergie que nous n’allons pas durcir demain la règle des 50% !

 

Lors de sa création, vous avez fait le choix d’un collectif et refusé l’idée d’un label. Qu’est-ce qui en fait sa force/ sa qualité par rapport aux labels existants ? Est-il donc un meilleur gage de qualité, une meilleure référence pour les clients/consommateurs ?

Le Collectif de la fleur française est une association basée sur la confiance et les déclarations sur l’honneur. La crédibilité du Collectif de la fleur française est la responsabilité de chacun à respecter les règles de notre charte. La force de notre réseau c’est le travail de chacun dans le même sens, ce but commun de re-créer une filière organisée et de remettre la beauté de la fleur française sur le devant de la scène. Pas besoin de label pour justifier que nos fleurs sont plus saines que celles cultivées au bout du monde (les normes agricoles françaises sont les plus strictes au monde !) et qu’elles sont plus fraîches (il faut entre 4 et 6 jours pour que des fleurs cultivées en Amérique du sud arrivent sur l’étal du fleuriste)

 

Est-ce que le Collectif de la fleur française est amené à questionner les professionnels du secteur en ce qui concerne le conditionnement (moins de plastique) et le traitement des déchets pour que toute la filière adopte une pratique globale de plus en plus propre en matière d’environnement, ou penses-tu que ce n’est pas son rôle ou sa priorité ?

Le futur de la fleur française est une vision globale et bien sur le conditionnement en fait partie. Nous testons en Bretagne des ramassages de fleurs uniquement bottelées avec un élastique directement dans le bac donc plus de cristal, ni de papier et il y aura une rotation des bacs entre les producteurs, grossistes et fleuristes. Nous sommes en recherche permanente de nouveaux matériaux, conditionnements pour faire évoluer les choses. Nos membres sont très attentifs au recyclage des matériaux, de l’eau, des déchets verts…

 

Au noyau, on aime dire que l’on se sent éco-sensible, et toi ? En quoi pourrais-tu te sentir éco-sensible ?

Les fleurs sont un maillon très important de l’équilibre de la nature. Les champs de fleurs sont des relais de la biodiversité et permettent aux pollinisateurs de se déplacer à travers le territoire. Cet aspect dont on parle peu me touche particulièrement.

 

De femme à femme, c’est bientôt le 8 mars, notre fête, quelle est ta plus grande fierté en tant que femme et entrepreneure ?

Le monde des fleurs était un monde d’hommes très fermé. Le collectif est représenté à 80% par des femmes toutes indépendantes et entrepreneuses. Le changement et le renouveau passera par leur courage et leur ténacité.

 

Vous l’aurez tous compris, c’est tout un pan de la filière de la fleur qui est en train de se reconstruire, nous tissons chaque jour sa toile au travers de la France, Ferme florale après ferme florale, fleuriste après fleuriste, consomm’acteur après consomm’acteur.

Il tient à chacun de jouer le jeu afin d’encourager chaque maillon de la chaîne.

Nous, au Noyau, nous y croyons profondément, parce que le local, l’humain et la Nature c’est la vie, non ?

Photo de couverture : Elsa Caza

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